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Espèces invasives : menace ou adaptation ? Un regard scientifique nuancé

Espèces invasives. Jussie, frelon asiatique et tortues de Floride sur la même photo.

Une espèce invasive, également appelée espèce exotique envahissante (EEE), est une espèce animale ou végétale introduite hors de son aire de répartition naturelle, dont la prolifération menace les écosystèmes, les habitats ou les espèces indigènes.

Une question de perception : regard scientifique et critique

L’utilisation du terme « espèce invasive » est parfois sujette à controverse. Certains scientifiques, comme Gilles Clément et Jacques Tassin, mettent en garde contre une vision trop négative et anthropocentrée du phénomène. En effet, toute introduction d’une nouvelle espèce ne conduit pas nécessairement à un bouleversement écologique. Dans certains cas, ces espèces peuvent même jouer un rôle de régulation ou de compensation dans des écosystèmes dégradés.

Jacques Tassin, chercheur en écologie végétale au Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement), se consacre à l’étude des dynamiques des écosystèmes. Il est notamment l’auteur de La Grande Invasion. Qui a peur des espèces invasives ?, publié en 2014

Gilles Clément, né le 6 octobre 1943 à Argenton-sur-Creuse, est un jardinier, paysagiste, botaniste, entomologiste, biologiste et écrivain français.

Caractéristiques d’une espèce invasive

1. Introduction hors de son habitat naturel

L’espèce est transportée volontairement ou accidentellement par l’homme dans un nouvel environnement où elle n’existait pas auparavant. Cependant, certaines de ces introductions peuvent avoir des effets neutres, voire bénéfiques.

2. Prolifération rapide

L’espèce se reproduit et se répand rapidement, souvent en l’absence de prédateurs ou de maladies qui la régulaient dans son habitat d’origine. Toutefois, à long terme, des ajustements écologiques se produisent souvent, et certaines espèces dites « envahissantes » finissent par trouver une place dans le nouvel équilibre biologique.

3. Impact négatif (ou pas)

L’espèce cause parfois des dommages à l’environnement, à l’économie ou à la santé humaine. Ces impacts peuvent inclure :

  • La compétition avec les espèces indigènes pour les ressources (nourriture, espace, lumière).
  • La prédation des espèces indigènes.
  • La transmission de maladies.
  • La modification des habitats.
  • Des dégâts aux cultures agricoles.
  • Des problèmes de santé publique.

Cependant, toutes les espèces introduites ne provoquent pas ces effets. Certaines deviennent des ressources pour d’autres espèces locales. Par exemple, certaines plantes qualifiées d’invasives, comme la jussie, peuvent contribuer à la dépollution de l’eau en absorbant les phosphates agricoles.

La jussie, espèce exotique envahissante
La jussie

Exemples d’espèces invasives

1. Plantes invasives

La renouée du Japon (Fallopia japonica)

Originaire d’Asie, cette plante forme des colonies denses qui étouffent la végétation indigène. Ses racines puissantes endommagent les infrastructures (routes, bâtiments).
Source : INPN – Renouée du Japon

L’ambroisie à feuilles d’armoise (Ambrosia artemisiifolia)

Originaire d’Amérique du Nord, son pollen est fortement allergène. Elle se propage rapidement dans les zones perturbées (chantiers, bords de routes).
Source : Ministère de la Santé et de l’Environnement – Ambroisie

La jussie (Ludwigia spp.)

Souvent critiquée pour sa prolifération dans les milieux aquatiques, cette plante joue pourtant un rôle épurateur en absorbant les nutriments issus de la pollution agricole. Son éradication brutale peut donc avoir des effets non anticipés.
Source : INPN – Jussie

2. Animaux invasifs

Le frelon asiatique (Vespa velutina)

Originaire d’Asie, il est un prédateur redoutable des abeilles domestiques et menace la biodiversité ainsi que l’apiculture.
Source : Frelon asiatique, description et biologie

La tortue de Floride (Trachemys scripta elegans)

Elle est souvent accusée d’évincer la cistude d’Europe. Cependant, son rôle dans l’écosystème pourrait être réévalué : elle survit dans des milieux pollués où la cistude ne peut plus vivre, ce qui souligne davantage le problème de la dégradation de l’environnement plutôt que la seule présence de l’espèce.
Source : INPN – Tortue de Floride

Pourquoi les espèces deviennent-elles invasives ?

Plusieurs facteurs peuvent contribuer à la prolifération des espèces invasives :

  • L’absence de prédateurs ou de maladies dans le nouvel environnement.
  • Une grande capacité d’adaptation et de reproduction permettant à l’espèce d’occuper rapidement de nouveaux habitats.
  • La perturbation des écosystèmes par l’homme, qui crée des opportunités pour ces espèces.
  • Les activités humaines, telles que le commerce international et le transport maritime, qui facilitent la dispersion d’espèces à travers le monde.

Une réflexion plus nuancée sur les espèces dites invasives

Plutôt que de diaboliser toutes les espèces exotiques, il est essentiel d’adopter une approche plus scientifique et pragmatique. Certaines espèces qualifiées d’invasives sont avant tout des indicateurs de la dégradation environnementale, et leur régulation doit se faire avec discernement.

La première menace pour la biodiversité n’est pas l’arrivée d’espèces étrangères, mais bien la destruction des habitats naturels par les activités humaines.

Préserver l’équilibre des écosystèmes demande une compréhension fine et non une approche simpliste basée sur le rejet des « intrus » biologiques.

Espèces invasives : un écho à l’actualité politique ?

À force de présenter les « espèces invasives » comme une menace existentielle, on finirait presque par imaginer un ministère de l’Identité écologique, chargé de filtrer les candidatures végétales et animales avant toute implantation. Pourquoi ne pas instaurer un visa biométrique pour les graines étrangères ou un comité d’acceptation pour les insectes venus d’ailleurs ? Mieux encore, une grande consultation citoyenne pourrait déterminer quelles nouvelles espèces ont le droit de s’établir parmi nous. Une démarche purement environnementale, bien sûr, sans aucun écho avec d’autres débats d’actualité…

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La lutte contre les plantes invasives en Normandie : un défi écologique majeur

Plantes invasives en Normandie

En Normandie, une menace souvent méconnue pèse sur la biodiversité locale : les espèces végétales invasives. Face à ce fléau, une équipe dédiée met tout en œuvre pour éradiquer ces plantes exotiques qui compromettent les écosystèmes et la santé publique. Décryptage de cette lutte acharnée menée par la brigade d’intervention.

Plantes invasives en Normandie

Les espèces envahissantes : un danger silencieux

Le problème des espèces végétales invasives est peu évoqué dans les médias, mais il n’en demeure pas moins crucial. En Normandie, comme ailleurs en France, certaines plantes exotiques s’adaptent si bien qu’elles étouffent littéralement la flore locale, menaçant ainsi la biodiversité.

L’ambroisie et ses effets délétères

L’ambroisie à feuilles d’armoise est particulièrement préoccupante en raison de ses effets allergiques sévères. Elle colonise rapidement les terres et nécessite une intervention urgente pour éviter des coûts de santé publique significatifs.

La renouée du Japon : une menace persistante

Spécialement prolifique autour d’Alençon, la renouée du Japon est un véritable cauchemar pour les écologistes. Sa capacité à se répandre rapidement et à occuper de larges zones représente un défi immense pour ceux engagés dans sa gestion et son élimination.

La brigade d’intervention : un bouclier contre l’invasion

Coordonnée par Jean-François Dufaux, chef de la brigade, cette unité unique en son genre en France travaille sans relâche pour combattre les espèces végétales nuisibles. Basée à Caen et Rouen, cette équipe dispose de moyens limités mais essentiels pour mener des actions décisives sur le terrain.

Actions stratégiques et équipements spécialisés

L’une des tactiques efficaces consiste à préférer l’arrachage manuel pour éviter de disperser des fragments de plantes, ce qui pourrait aggraver leur propagation. Les opérateurs, vêtus de combinaisons protectrices dignes de l’époque Covid, travaillent méticuleusement pour arracher jusqu’à vingt centimètres sous terre.

  • Arrachage manuel des plantes avant leur floraison
  • Utilisation d’outils spécifiques comme des sécateurs
  • Compostage sous supervision ou abandon contrôlé des déchets végétaux

L’importance de l’identification et de la formation

Afin de mieux reconnaître les plantes invasives comme la renouée du Japon ou la berce du Caucase, la brigade recommande l’utilisation d’applications telles que Pl@ntNet. Parallèlement, des formations sont organisées pour sensibiliser et former la population locale à adopter de bonnes pratiques.

Initiatives locales et participation communautaire

Le combat contre les plantes invasives ne peut réussir sans l’implication active des communautés locales. Diverses entités comme les écoles, les espaces de conservation et même les pêcheurs sont mobilisés pour participer à cet effort collectif.

Session de sensibilisation et de prévention

Des séances de formation sont menées un peu partout en Normandie, incluant les lycées de Briouze et Mortagne-au-Perche. Ces sessions visent non seulement à informer le public sur les dangers liés aux plantes invasives, mais aussi à encourager des pratiques préventives.

Rôle des acteurs locaux

Les collectivités locales, les associations de pêcheurs et le grand public jouent tous un rôle capital dans ce combat. Nettoyer minutieusement les équipements après usage, surveiller et signaler la présence de nouvelles espèces invasives font partie des mesures recommandées pour freiner leur propagation.

La bataille contre les plantes exotiques envahissantes en Normandie est loin d’être terminée. Alors que la brigade d’intervention dirigée par Jean-François Dufaux continue de déployer tous ses efforts pour contrer cette menace, la coopération des communautés locales demeure indispensable. Ensemble, nous pouvons espérer sauvegarder notre précieuse biodiversité et préserver la richesse écologique de la région normande.

Et les espèces animales invasives ?

En Normandie, la lutte contre les espèces exotiques envahissantes comme le moustique tigre, la pyrale du buis, le frelon asiatique, l’écrevisse américaine et bien d’autres et gérée par le Fredon (Fédération Régionale de Défense contre les Organismes Nuisibles).

Si vous trouvez chez vous ou à proximité un nid de frelons asiatiques, vous pouvez également contacter une entreprise locale pour venir le supprimer, à la fois pour la sécurité mais aussi pour la biodiversité. La liste des entreprises guêpes et frelons de votre département sur l’annuaire ALLO FRELONS. Des aides publiques sont allouées pour aider à la destruction des nids.

Les entreprises de lutte contre les guêpes et les frelons en Seine-Maritime – Annuaire ALLO FRELONS (allo-frelons.com)

Comment choisir une entreprise de destruction de nids de guêpes et frelons dans le département de l’Eure (27) ? – Annuaire ALLO FRELONS (allo-frelons.com)

Combattre les nuisibles : entreprises de destruction des nids de guêpes et frelons dans le Calvados – Annuaire ALLO FRELONS (allo-frelons.com)

Les entreprises de lutte contre les guêpes et frelons dans le département de la Manche – Annuaire ALLO FRELONS (allo-frelons.com)